lundi 8 novembre 2021

le Fumiste

 BONJOUR,

Fumiste est un terme péjoratif pour parler d'une personne peu fiable. C'est aussi la profession de notre individu, un jeune homme pas encore majeur à cette époque...à son époque.


Le 8 mars 1864 à 21 h à Crisenoy (77- Seine et Marne) naît Charles Théodore CORNU  ; il est le 4ème enfant d'un couple modeste ; Louis Auguste a déjà 40 ans et Louise a la trentaine. Il y aura encore 3 autres naissances après la venue de ce garçon.



L'AIR et l'EAU dominent dans le thème 

le cadran NORD OUEST est fortement occupé.

MARS sur le 30° Capricorne : un homme ...au milieu d'une volière dont les oiseaux sont familiers....

Du 27° SCORPION où JUPITER se trouve en Maison 2,  JANDUZ dit : tous les biens acquis ou volés sont condamnés à être perdus tôt ou tard.

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Le métier d'oiseleur remonte à 1402 ; c'est Charles VI qui a donné à ces marchands d'oiseaux l'autorisation d'effectuer leur commerce le Dimanche, sur le Grand Pont. Seuls les maîtres marchands peuvent accrocher les cages de canaris et serins aux murs des maisons.


En 1888, Jules LEFÈVRE exerce sa profession, quai des Fleurs. C'est un homme charmant, doux. Il a atteint la quarantaine ; veuf depuis peu, il habite seul un petit appartement au 8 de la Rue Charles à Charentonneau. Il est le père d'une fille de 9 ans qui ne vit pas avec lui. Il est également propriétaire d'une maison avenue de Ledru-Rollin qu'il loue. 

Ce matin du 14 février 1888, le long des berges de la Marne, quai de la Pie, son corps étendu sur le dos, la tête à demi enfoncée dans le sable, a été retrouvé par un ouvrier de la carrière qui se rendait à son travail. 

On va vite se rendre compte qu'il ne s'agit pas d'un accident. Des traces de lutte sont relevées et une grande traînée de sang est bien visible sur plus de 100 m. On distingue une dizaine de coups portés dans le dos de la victime avec une arme tranchante. Son front est martelé d'un coup de talon. Son porte monnaie a été vidé.

La mort remonte sans doute à la veille au soir. 

Ainsi on enregistre son décès à la date du 13 février 1888 vers 21 h.

Les policiers ont pu remonter le fil de sa dernière journée. Durant l'après-midi, il a été vu en compagnie de 4 hommes dans un café de Charentonneau. Leur compagnie était joyeuse. Vers 17 h, il a fait visiter sa maison à un ouvrier ; on a même pu entendre une partie de la conversation. Le jeune homme, ouvrier fumiste, est sous les drapeaux et profite d'un congé d'un mois. Le propriétaire lui assure que les travaux seront réalisés sous peu.

  L'oiseleur qu'on connaît pour être une personne sobre, aurait fait le tour des cafés avec le jeune homme. Devant son état d'ébriété, un tenancier de bar lui a même proposé de lui offrir le gîte pour la nuit mais son camarade de boisson s'y est opposé. 

Un autre témoin dira avoir vu les deux hommes, vers 19 h 30 après le quartier de la Pie, en direction des carrières. Passablement éméché, l'oiseleur priait  son compagnon de le laisser tranquille.

Le travail des policiers avance bien. Ils ont réussi à identifier les membres de la bande joyeuse de l'après-midi. Il s'agit d'ouvriers couvreurs : "Pas de veine", "la Gueule", "Mes Chaussettes". Ceux-ci devaient être embauchés par l'oiseleur pour les travaux de sa maison. 

Le 4ème homme est un de leurs collègues toujours sans le sou. Il s'agit de Charles CORNU, 23 ans. Il est déjà connu des services de Police ; condamné déjà pour vol en 1879 alors qu'il n'avait que 15 ans et en 1884, avant ses 20 ans, pour coups et blessures, il a déjà séjourné deux fois derrière les barreaux, durant 3 mois. Actuellement, soldat au 51ème Régiment de ligne, à Beauvais, il séjourne chez ses parents durant "sa perm" . La fouille de sa chambre permettra d'en apprendre plus sur ses activités de proxénète. Une veste tâchée de sang sera retrouvée. 

Sa mère révélera que son fils est rentré tardivement couvert de terre et de sable. Il aurait expliqué qu'il était tombé dans une carrière avec Lefèvre qui lui y serait resté ! Ses parents ne l'ont pas revu depuis, le lendemain, il s'est rendu à Alfortville en quête d'un emploi.

Quinze jours se sont écoulés. C'est la police belge qui va donner des informations aux policiers français. Celles-ci, hélas, se révéleront fausses.

Le 12 mars 1888, Charles CORNU, contre toute attente, se présente spontanément dans les bureaux de la Sûreté. Il revient de Belgique ! Il explique avoir pris la route, le 14 février, pour Creil, en compagnie d'un certain COUTURIER qui lui aurait avancé la somme de 50 frcs pour embarquer pour le Congo. Ensemble, ils se seraient rendus à Valenciennes, Mons, Tournai puis Oostende


Son embarquement n'a pas été possible ne disposant pas de papiers. COUTURIER, lui, est bien parti.

Charles CORNU s'est ensuite rendu à Bruxelles où il a trouvé un emploi chez un entrepreneur de couvertures. À la fin du chantier, il est revenu à Paris, avec l'intention de se rendre aux Autorités après avoir embrassé sa mère une dernière fois. Mais persuadé que la maison de ses parents serait surveillée, il a préféré se livrer.

Concernant le conflit qu'il l'opposa à LEFÈVRE, il expliqua que l'homme lui ayant fait des propositions obscènes, il a répondu par un coup de poing en pleine figure. L'oiseleur aurait sorti un couteau qu'il aurait à son tour saisi et aurait porté plusieurs coups dans le dos de son adversaire. La boisson aidant, il l'aurait roué de coups mais son intention n'était pas de le tuer.

Lors de la reconstitution des faits, des points discordants furent soulevés : le lieu de la chute, le déplacement du corps, les coups portés sur le front de l'homme. 

CORNU révéla alors que son intention avait été de voler le portefeuille de l'oiseleur qu'il croyait bien garni. Après l'avoir fait boire dans plusieurs estaminets, il tenta de le lui subtiliser mais l'homme protesta tout haut, attirant l'attention des riverains. Il le fit chuter dans la carrière, et alors que l'oiseleur déclarait déjà qu'il se plaindrait à la Police de ses agissements, le jeune homme pris de rage, se mit à la frapper. Le couteau utilisé était bien le sien. Il s'empara d'une somme modeste : 37,50 frcs trouvé sur sa victime. S'il s'est rendu c'était pour s'assurer l'indulgence de ses juges alors qu'il se savait recherché.

L'indulgence, ....Il l'aura 4 mois plus tard.

Au lieu d'une condamnation à Mort décidée en Mai, le Président Sadi CARNOT lui accorde la grâce. 

Il partira sur le bateau l'Orne, le 20 janvier 1889, de Toulon.

Il séjournera en Guyane, au bagne des îles du Salut ; il y décédera le 23 Août 1892 à 28 ans. 

Son père, lui, est mort deux ans et demi après le procès.

Bonne Lecture,

Évelyne LUCAS






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